VICTOIRE AU PAYS DES WALLABIS !
Le jour J est arrivé. Dès le petit déjeuner, tous les esprits sont tournés vers le match, véritable enjeu de cette tournée. A 10h30 la délégation mastique les pâtes et le blanc de poulet négociés la veille. La remise des maillots débute 45 min plus tard. Tous les accompagnateurs entourent les joueuses. Benjamin, l’entraîneur, est le maître de cérémonie. Il connaît parfaitement ses filles et prononce des propos bien sentis adaptés au vécu et à la personnalité de chacune, leur tirant émotion et rage de vaincre avant que le maillot ne soit remis par des membres sélectionnés dans les accompagnateurs. Tout le monde grimpe dans le bus pour arriver à Victoria Barracks à 12h30. L’échauffement débute. Il fait un temps radieux, l’anti-cyclone est toujours aussi puissant. L’ambiance est joyeuse, un groupe de musiciens de la marine australienne joue et chante des morceaux de house music (guitare électrique, basse, synthé, batterie, un chanteur et une chanteuse, ils sont au top!). Après une si longue attente, le temps file sans pouvoir le fixer. Les équipes et la la musique se mettent déjà en place, les capitaines présentent leurs joueuses. Les hymnes nationaux, chantés, retentissent. Les périodes dureront 35 minutes, en coulisse nous argumentons pour qu’elles soient portées à 40 min pour le prochain jeu en France, égalité des sexes oblige. Une équipe vidéo avec deux commentateurs professionnels sont en place pour diffuser le match en temps réel.
A 14h00, le coup d’envoi est donné. D’emblée, le RCMN joue dans le camp australien. Un plaqueur qui ne relâche pas nous donne une pénalité transformée à 1’30, 0 à 3. Une autre pénalité à la 6′ est ratée mais à la 10′ Milena se saisit du ballon sur un regroupement et part toute en puissance aplatir en coin, 0 à 8. A la 18′, la RANRU est dans nos 22 m depuis 3 minutes, notre défense se relâche, les avants australiennes poussent, leur demi de mêlée se faufile, passe dans une porte qui ne se referme pas à temps et dépasse l’en-but. L’essai est transformé en coin, 7 à 8. S’ensuit un passage à vide de nos joueuses qui ne retrouvent pas leur sensations de Canberra, peut-être inhibées par l’enjeu. Les Rouges et Bleues sont pénalisées à plusieurs reprises. Un sursaut se crée avec les avants dans les 5 dernières minutes de la première période, à nouveau conquérantes, notre pack pousse fort une mêlée fermée, la balle sort rapidement vers les trois-quarts, Eva Dourthe, en N° 13, bien sur ses appuis, fait une percée après un joli contre-pied qui efface deux joueuses et vient poser le ballon entre les poteaux, 7 à 15 à la pause.
Le match reprend à 14h50, nos avants dominent leur sujet mais sans concrétisation, en raison de nombreuses imprécisions et avec des arrières en mal d’inspiration. A la 48′, une nouvelle fois les avants en ruck dans les 5m fixent la défense adverse, le ballon sort cette fois rapidement et parvient jusqu’à Khadidja, en N°12, qui accélère dans un espace libre et parvient à franchir la ligne pour aplatir quasiment sous les poteaux, Adeline transforme, 7 à 22. A la 57′, les avants du RCMN continuent leur travail de sape, sur une fixation, le ballon part rapidement par la ligne des trois-quarts vers l’aile opposée, l’ailier gauche Audrey Alexis Alexandre se fait stopper par un arrêt buffet d’une défense qui avait bien glissé mais Linda, en N° 5, avait suivi et récupère le ballon libéré par Audrey pour l’emporter en coin et aplatir, 7 à 27. Le match semble bien se présenter aux joueuses de la marine nationale mais rien n’est fait. D’autant moins que la domination de nos avants qui nous permettrait de se mettre à l’abri ne se concrétise pas malgré deux cartons jaunes successifs adverses et la domination en touche avec Linda, sauteuse en parfaite symbiose avec ses piliers (Manon Pujol et Anais Marie remplacées par Anais Chemmelat et Fia Faletuuloa) et son lanceur (Manon Sauvage puis Marjory Maj). Quelques défaillances en défense nous inquiètent. Nos craintes vont se confirmer. A la 61′, sur une des rares touches réussies par la RANRU, sur la droite de nos 22m, la balle est vite sortie et part vers un développement sur la gauche, le demi d’ouverture de la RANRU efface deux de nos joueuses et n’a pas plus qu’à passer à son ailier qui va chercher l’essai en coin. L’excellente buteuse australienne transforme, 14 à 27. Le suspens reste entier. 68′ de jeu, l’attaque française est cette fois massive et avec du soutien, Linda avance de 10 mètres malgré l’opposition de deux joueuses et libère proprement son ballon au sol, Milena qui suivait s’en empare contourne le ruck qui venait de se former et pousse en énergie pour marquer entre les poteaux, 14 à 34. A 10 minutes de la fin, ce sera difficile de revenir pour les Australiennes. Nous entendons le commentateur qui annonce que les Françaises viennent de tuer le match. Qu’il dise vrai ! Et d’autant plus qu’à la 73′, une interception dans nos 22m malgré une forte domination et après une passe mal assurée voit le centre du RANRU remonter tout le terrain au pied pour finalement marquer entre les poteaux, 21 à 34. A 5 min de la fin, perdre ce match serait trop dur. Pas de faute en défense. Les filles sont courageuses, elles s’appliquent, elles la veulent cette coupe. En rage et à la dernière minute, Milena marque le dernier essai de la partie (son troisième). Score final 21 à 39. Le trophée est tricolore, seule la victoire est belle. Elle est même magnifique. Bravo les filles, vous faites honneur au RCMN et à la marine !
La joie est dans les rangs, les filles de la marine australienne nous auront fait trembler mais ce sont les embrassades et autres congratulations qui fusent désormais autour d’une cordiale camaraderie après le combat. S’ensuivent les discours et la remise de la coupe par le représentant du chef d’état-major de la marine australienne. Elle est brandie par la capitaine autour de ses camarades. Mission remplie !
Après les congratulations, nous restons sur le magnifique terrain de Victoria Barracks pour savourer l’instant. Nous avons largement le temps de nous préparer pour la « farewell reception » qui sera donnée au mess de la première flotte au centre ville. Pour marquer l’importance de l’événement, la ministre avait exprimé son intention de se rendre à cette petite fête. Elle commencera sans elle, retenue par les obligations fréquentes de tout ministre. Nous sommes accueillis avec cordialité, une deuxième nature chez les Australiens, un buffet est dressé, la pompe à bière est opérationnelle, un coin fumeur est même dégagé où se rendent les goûteurs de cigare pour fumer celui de la victoire. La vidéo du match tourne en boucle sur grand écran. Une heure après notre arrivée, le président de la RANRU prend la parole pour se féliciter de cette phase pionnière d’un trophée perpétuel, le bonheur d’être ensemble autour de ce formidable sport de camaraderie, de combat et de défi qu’est le rugby. Le chef de la délégation lui renvoie la pareille. Les mécènes ne sont pas oubliés de part et d’autre. Quel dommage que leurs obligations ne leur aient pas permis de se joindre à nous ! La marine australienne a bien fait les choses en faisant frapper une médaille (« coin » très en vogue chez les anglo-saxons et malheureusement perdue de mode chez les Français) pour marquer l’événement. Elle sera remise à chacune des joueuses. Nous procédons à d’autres échanges de cadeaux. La tension est libérée, la musique d’une sono envahit le mess et les danseurs occupent joyeusement la piste. A 21h00, la courtoisie nous impose un départ, les unes rentreront directement à Penguin, les autres resteront à Sydney jusqu’à la nuit avancée pour rentrer toutes dignement et toujours en groupe, selon les valeurs de la marine et du rugby. Le petit déjeuner du lendemain sera facultatif. Quelle journée mémorable !
Liste des joueuses [28] : l’équipe est composée d’un tiers de joueuses de TOP 16 et Elite, un tiers issues de Fédérale 1 ou 2, et d’un dernier tiers qui pratique en loisirs.
Delphine THOMAS-ROGNON, Eva DOURTHE, Annais CHEMMELAT, Amandine DUFOUR, Linda KACEM, Marine LEPAGE, Estelle PERRON, Anna CHABERT, Elodie DUBANT , Fia FALETUULOA, Gaelle GACA, Audrey ALEXIS-ALEXANDRE, Eliette BERTHEAU-TERRASSON, Adeline CARRASQUET, Coralie CAUP, Océane GARANGER, Justine GASPAROUX, Marjory MAJ, Anaïs MARIE, Mélissa OYARZABAL, Fantine PUILLANDRE, Manon PUJOL, Loréna ROUSSOTTE ; Perrine VERBRUGGHE, Khadidja CAMARA, Léa MOREL, Manon SAUVAGE, Miléna SOLOCH.